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Dette de jeu : l'article 1695 du code civil empêche toute action en remboursement

Le 16 janvier 2012
 
L'énormité de la somme prêtée constituée exclusivement par la remise de sommes en espèces peut constituer la preuve d'une dette de jeu, pour laquelle la loi n'accorde aucune action.

 

M. X. a assigné M. Y. en paiement de la somme 1.753.163,70 euros qu'il soutenait lui avoir prêtée entre 1995 et 1997. M. Y. a soulevé l'exception de jeu.
La cour d'appel de Lyon, dans un arrêt du 15 juin 2010 a déclaré son action irrecevable. Elle a retenu que pendant plusieurs mois, M. Y. avait signé chaque mois un acte dans lequel il reconnaissait avoir reçu une somme en espèces de M. X. pour ses besoins personnels et s'engageait à la rembourser au plus vite, ces actes ayant été récapitulés dans une reconnaissance de dette générale signée des deux parties, par laquelle M. Y. s'était reconnu débiteur de la somme de 11.500.000 francs majorée des intérêts capitalisés jusqu'au 31 juillet 1997 au taux de 10 % l'an.
La cour d'appel a donc jugé que la cause de l'obligation de M. Y. énoncée dans cet acte est présumée exacte et qu'il lui incombe de démontrer que le prêteur ne lui a pas versé la somme litigieuse ou que ce prêt lui a été consenti pour jouer.

La Cour de cassation approuve les juges du fond. Dans un arrêt du 4 novembre 2011, elle retient qu'au titre des circonstances permettant de caractériser l'existence d'une dette de jeu, les juges d'appel ne se sont pas bornés à se référer à l'énormité de la somme globale prêtée, constituée exclusivement par la remise de sommes en espèces, mais ont en outre fait état de l'établissement de reconnaissances de dette mensuelles sur une longue période, de ce que M. Y. était un joueur, ainsi que du fait que, si M. X. contestait l'être également, l'une des attestations produites indiquait pourtant qu'il s'était adonné aux jeux d'argent et ont ajouté que celui-ci n'avait pu d'ailleurs justifier de l'origine des fonds qui lui auraient permis de prêter des sommes considérables, sa déconfiture au moment des faits étant avérée par l'existence d'une procédure collective, tout en constatant enfin qu'il ne pouvait prétendre avoir ignoré la destination des sommes litigieuses. Il était donc établi qu'il s'agissait de fonds destinés au jeu, ayant permis à l'emprunteur aussi bien de payer ses dettes que de continuer à jouer en dehors d'un établissement dans lequel le jeu est régulièrement autorisé. M. Y. était donc en droit à se prévaloir de l'article 1965 du code civil interdisant toute action pour une dette de jeu.

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